Par Raphaël Malasoma
Gainsbourg (vie héroïque), c’est l’histoire drôle et fantastique de Serge Gainsbourg et de sa fameuse gueule. L’histoire d’un petit garçon juif fanfaronnant dans un Paris occupé par les Allemands, celle d’un jeune poète timide laissant sa peinture et sa chambre sous les toits pour éblouir les cabarets transformistes des Swinging Sixties. C’est une vie héroïque où les créatures de son esprit prennent corps à l’écran et sa verve se marie aux amours scandaleuses. De là nait une œuvre subversive avec en vedette un citoyen fidèle et insoumis qui fera vibrer la planète entière.
Loin de tout autre biopic comme Ray ou La Môme, Gainsbourg (vie héroïque) est un conte nous faisant partager l’imaginaire du chanteur. La matérialisation de ses visions telles que « La Patate », caricature du juif, mais surtout « La Gueule », alter ego de Gainsbourg, éloigne le film des autres films « sur la vie de… » dont le cinéma semble friand depuis plusieurs années. « La Gueule », interprété par Doug Jones (acteur fétiche de Guillermo Del Toro), se révèle être un Gainsbarre avant l’heure, guidant le jeune peintre vers son destin de chanteur provocateur.
Le ton est donné dès le générique d’ouverture, entièrement conçu en animation, où l’on suit le jeune Lucien Ginsberg, futur Gainsbourg, nager dans un océan accompagné de poissons puis dans le ciel d’un Paris des années 40 occupé par les Allemands.
La réalisation du jeune Johann Sfar se révèle inégale. Certaines apparitions, telle celles de « La gueule » et des moins présents Frères Jacques dynamisent la narration, poussant le personnage vers de nouveaux horizons. D’autres, notamment la séquence avec Juliette Greco sous les traits d’Anna Mouglalis mais surtout celle de Sara Forestier en France Gall, plus fade, n’ont pas forcement leurs place dans ce long métrage de 2h10 non exempt de certaines longueurs.
Le casting n’est pas sans fausses notes également. Bien qu’Éric Elmosnino et Laetitia Casta, sosies des personnages qu’ils interprètent, ramènent les personnages de Serge Gainsbourg et de la belle Brigitte Bardot à la vie, on ne peut pas en dire autant du reste de la distribution. Sara Forestier nous donne des incertitudes sur la possibilité de l’actrice à jouer/chanter dans une séquence qui se veut drôle sans y parvenir.
Petit tour de force pour une première réalisation, le film, à la fois biopic et fiction, montre un Gainsbourg dont il est difficile de démêler le vrai du faux. Dommage de ne pas en savoir davantage sur les démons intérieurs du personnage. On regrette de voir ses relations avec les femmes réduites à un défilé de mannequins rythmé par les compositions du chanteur. Le film n’en reste pas moins un bon portrait de l’homme et un excellant divertissement.
Un film de Joann SFAR
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Sortie: 20 Janvier 2010 